CHAPITRE X

Obi-Wan et Si Treemba rampèrent sur toute la longueur du conduit d’aération, puis s’arrêtèrent devant une grille pour observer la cabine en contrebas. Un énorme Whiphid était endormi sur sa couche. Sa fourrure émettait une odeur rance à laquelle venait s’ajouter un relent de mauvaise bière dresselienne.

Les Whiphids portaient tous des peaux sales provenant de Toola, leur planète. Partout s’empilaient des crânes d’animaux peints de couleurs vives, tels des trophées de chasse. Obi-Wan repéra un détail qui prouvait que des Hutts avaient occupé ces mêmes couches : le sol était jonché de fragments de petits animaux à demi dévorés.

Le garçon étudia longuement la pièce plongée dans la pénombre. Le Whiphid était probablement soûl. Quelque chose clochait. Peut-être faisait-il semblant de dormir ?

Son malaise s’intensifia. Des vagues sombres traversaient la Force, il le sentait. Le Mal imprégnait cette partie du vaisseau comme un nuage toxique. Obi-Wan avait déjà fouillé plusieurs chambres. Il y avait trouvé des armes illégales – des fusils à pompe et des grenades biotiques. Il avait aussi déniché un petit coffre rempli de puces de crédit, peut-être volées. Mais rien qui ressemble à un thermocom.

Il examina à nouveau le Whiphid allongé. Sous sa tête, Obi-Wan aperçut une arme à peine dissimulée. Chez de telles créatures, dormir avec un blaster à portée de main était tout à fait normal. Le Whiphid respirait par petits coups secs irréguliers. S’il dormait, ce n’était pas d’un sommeil très profond.

Le garçon examina silencieusement la chambre, puis il regarda derrière lui, dans l’étroit conduit d’aération. Si Treemba était là, sur ses talons. Le malheureux Arconien pouvait à peine faire passer son énorme tête triangulaire dans l’espace réduit. Il se cogna contre le métal, et Obi-Wan serra les dents.

Les yeux aux multiples facettes de Si Treemba émettaient une faible luminescence. De toute évidence, les Arconiens n’étaient pas des chasseurs. Obi-Wan espéra que le Whiphid n’ouvrirait pas les yeux et ne verrait pas l’Arconien penché au-dessus de lui. Il retint son souffle et continua d’avancer dans le conduit jusqu’à la cabine suivante.

L’odeur qui s’en dégageait était horrible – un mélange de graisse rance et de cheveux sales. Obi-Wan entendit des voix, le rire sonore des Hutts, le grondement animal des Whiphids.

Il traversa des amas de poussière et se retrouva au bord de la grille. La cabine était pleine de Hutts et de Whiphids accroupis, en train de jouer aux dés. Si Treemba ne pourrait jamais passer sans qu’ils le remarquent. Il leur faudrait battre en retraite.

Obi-Wan jeta un coup d’œil en arrière : Si Treemba reculait prudemment vers le conduit précédent. Il lui adressa un signe de la main pour attirer son attention. Mais soudain, une lumière éblouissante jaillit, suivie d’un fracas assourdissant. On venait de tirer une décharge de blaster à travers la grille !

L’air s’emplit de fumée. Ils étaient pris au piège !

Obi-Wan fit de grands signes à son ami pour qu’il le rejoigne, mais une grosse patte velue passa au travers de la grille et empoigna l’Arconien par le cou !

Si Treemba ouvrit de grands yeux terrifiés. Il émit un bruit étouffé quand la patte l’attira à travers la grille fracassée. Obi-Wan entendit le bruit sourd que fit son corps en heurtant le sol.

Le rire cruel d’un Hutt retentit avec force.

– Alors ce n’est qu’un rat, hein ? Je vous avais bien dit que j’avais flairé un Arconien !

Le cœur d’Obi-Wan battait la chamade. Il savait que, d’un instant à l’autre, quelqu’un allait passer sa tête par la grille, blaster en main, à la recherche d’autres intrus.

Il partit le plus silencieusement possible vers une bifurcation, à vingt mètres devant lui. Il ruisselait de sueur. Il entendait les cris étouffés de Si Treemba. C’était injuste : c’était lui, Obi-Wan, qui avait entraîné l’Arconien dans un tel pétrin.

Un grognement retentit :

– Je ne vois personne d’autre là-dedans.

Le garçon n’osa pas retourner en arrière pour aider son ami. Il préféra continuer de ramper à l’aveuglette.

Obi-Wan finit par s’arrêter, le temps de reprendre son souffle, et réalisa que, de ce côté-ci du vaisseau, il ne risquait pas de trouver de l’aide.

Qui-Gon lui avait conseillé de ne pas s’aventurer chez Offworld. Or, maintenant, Obi-Wan se rendait compte qu’il lui fallait revenir sur ses pas. Les Hutts et les Whiphids devaient prendre Si Treemba pour un espion et risquaient de le torturer pour lui extirper des aveux. Il était même possible qu’ils le tuent. Et ils n’attendraient pas longtemps pour cela.

Comment avait-il pu agir avec si peu de discernement ? Il aurait dû se douter qu’il serait difficile de pénétrer en territoire ennemi. Il avait entraîné Si Treemba au cœur même du danger. Il avait exploité sa loyauté.

Les réserves de Qui-Gon étaient donc fondées ? peut-être ne méritait-il pas de devenir un Jedi.

Obi-Wan s’essuya le front avec un pan de sa tunique. Il s’assura que son sabrolaser était bien attaché.

Puis il décida de porter secours à son ami.